OW2con’18 Retour d’expérience… Passez le mot : l’Open Source est partout !

Chapeau
L’OW2con’18 est un ensemble de conférences autour des technologies Open Source d’infrastructure. L’événement s’est déroulé début juin regroupant plus de 150 personnes, venant de 5 pays différents et représentant 70 entreprises. Au cours de ces deux jours une quarantaine d’intervenants ont pris la parole. Beaucoup de thèmes ont été couverts : la sécurité, l’intégration continue, l’Open Cloud, l’IoT, l’intelligence artificielle, le big data, la blockchain… Sur fond de RGPD et de « Dockerisation » générale, l’automatisation et les architectures virtuelles hautes performances étaient au cœur de plusieurs présentations des plus intéressantes.
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OW2 est une communauté informatique mondiale indépendante dédiée au développement de logiciels d’infrastructure Open Source. Elle regroupe des entreprises, des collectivités et des organismes de recherche de premier plan comme Orange, INRIA, la Mairie de Paris, l’Institut Mines Telecom, Airbus Défense et l’Université de Pékin. Plus de cent projets sont hébergés dans la base de code OW2.

 

Le programme de la journée a commencé par un kick-off de Jean Parpaillon, Christian Paterson et Cédric Thomas. Suivi par trois keynotes, la table ronde a ouvert le débat : « Le logiciel Open Source : un parcours entre valeurs éthiques et valeur économique ». Les intervenants de la table ronde étaient : Stéphane Ferminger, Benjamin Jean, Max Mehl, Simon Phipps, Cédric Thomas, Robert Virding. Ils ont partagé leurs points de vue sur le sujet. Le logiciel libre a été défini originellement comme la liberté d’utiliser, copier, modifier et redistribuer le code source. Ces quatre règles simples ont eu le pouvoir de changer l’industrie du logiciel. Des valeurs éthiques et de la question de l’évangélisation, le sujet « farmers vs miners » a été soulevé. Autrement dit : que penser des contributeurs par rapport aux exploitants (certaines sociétés le faisant massivement) ? La question de la double posture entre le besoin de notoriété des projets et le fait que le résultat de tout ce travail soit gratuit s’est également posée. Une réponse : la nécessité de la garantie de la liberté afin de pouvoir exprimer pleinement la philosophie de l’Open Source. Plusieurs exemples témoignant du besoin d’ouverture du code logiciel et de sa valeur ont été évoqué. L’obligation « Open Source et Open Data par défaut » définie par l’État français et le projet Charte Libre Emploi (que BOSSTEK a signée avec le CNLL) ont été cités comme projets bénéfiques pour les logiciels libres. A contrario, le système de reconnaissance faciale anti-délinquance de Londres et le principe des bornes de votes numériques ont été pointés du doigt. Leur code n’est pas ouvert alors qu’il touche directement à la liberté des citoyens. GitHub a été donné en exemple de modèle économique. Ils utilisent des produits ouverts auxquels ils contribuent. En créant de la complexité, ils forcent leurs concurrents à acquérir les compétences et créer le système de valeur et la complexité à leur égale. Mais est-ce-qu’une société ne redistribuant pas l’intégralité du code est irrespectueuse des valeurs ? Enfin, le programme Software Heritage de l’UNESCO, véritable « bibliothèque d’Alexandrie des logiciels », a été salué pour sa contribution au patrimoine de l’humanité. Un trait commun dans les conclusions des intervenants : Pour que l’Open Source soit durable à long terme, il y a une éducation du marché à faire, des efforts de marketing et de promotion à effectuer. Beaucoup de nouveaux acteurs majeurs du web ont démontré le potentiel de succès d’un business model basé sur l’Open Source. Elles ont su l’intégrer dans la culture d’entreprise et en partager les valeurs. Ainsi, il devient possible de créer de la valeur dans le respect des valeurs.

 

Les deux journées se sont déroulées dans un rythme soutenu mais serein. Il serait trop long de détailler la trentaine d’interventions, mais voici quelques moments parmi ceux que nous avons le plus apprécié.

Antoine Mottier a délivré une présentation claire et détaillée à propos de l’intégration continue. Bonitasoft emploie Git, Jenkins, Docker et Ansible pour sa plateforme. Les avantages de chacun des produits, leur articulation et les challenges liés ont été décryptés avec une grande maîtrise. Une telle plateforme possède de grandes qualités : isolation des environnements, satisfaction des besoins Dev et Ops, automatisation, souplesse et robustesse.

Alessandro Portosa et Paolo Raineri, ont présenté Knowage Suite. Cette solution fournit à ses utilisateurs des outils traditionnels et avancés pour analyser des données hétérogènes. Les entreprises récoltent de plus en plus de données en masse. Agrégeant de nombreuses sources externes, ces données récoltées sont un enjeu stratégique et commercial. Les présentateurs ont démontré qu’il n’y a plus de place pour l’instinct dans la compréhension du marché et la prise de décisions stratégiques à l’heure du big data. Leur suite logicielle fournit les outils d’analyse et d’aide à la décision à partir de données hétérogènes.

Denis Caromel et Paraita Wohler du CNES ont fait un retour d’expérience sur l’analyse d’images satellites des produits Sentinel (plateforme PEPS), sur site et dans le Cloud avec ProActive. Les images satellites sont de plus en plus précises, ce qui implique des images lourdes et plus longues à traiter. Une foule d’informations est liée à chaque pixel. La puissance de calcul est disponible chez les différents fournisseurs de Cloud mais se paie à la consommation. La problématique devient évidente : optimiser la planification et l’utilisation de ces ressources consommées à grande échelle. Les données à traiter représentent 7PB en 2 ans ! ProActive permet d’optimiser la planification et l’orchestration de ressources à grande échelle. La définition de workflows personnalisés, l’interface graphique de gestion et la fédération de ressources de calcul hétérogènes sous forme d’architecture virtuelle sont parmi les principales fonctionnalités de cette solution Open Source. Des sessions de calcul impliquent 20 000 cœurs ! Impressionnant ! À cette échelle, la gestion de l’élasticité est incontournable surtout lorsqu’on paie le Cloud à la demande.

Julien Brodier a présenté un projet blockchain de la vie réelle : P2P energy. Le principe est très concret : tout particulier ayant un bilan électrique positif, grâce à la production des panneaux solaires par exemple, peut revendre cette électricité. Le projet propose un traitement de la facturation entre particulier par l’intermédiaire d’une blockchain. Ainsi, les smart contracts définissent les règles d’échanges, toutes les consommations sont enregistrées et les transactions réalisées de façon sécurisée grâce à la blockchain. Certains problèmes subsistent : la difficulté à garantir la sécurité et l’immuabilité des smarts contracts entre autres.

Sous titrée « big data et intelligence artificielle au service des métiers et process », l’intervention de Hervé Rannou concernait Warp10, un framework de traitement et d’analyse prédictive pour les données Time Series. L’IoT génère le volume de données qui a le plus augmenté ces dernières années. Le besoin en traitement s’intensifie en même temps que la complexité et le besoin en ressources augmentent. L’utilisation de données Time Series auxquelles un tag géographique est ajouté permet au travers de Warp10 de traiter de grand volume de données hétérogènes. La problématique des ressources est en grande partie compensée par WarpScript, un langage dédié accélérant considérablement les traitements. Comme le relate Hervé Rannou, certaines sources considèrent que toutes les données d’opérations ou d’affaires deviendront bientôt des Time Series.

Jamil Chawki et Francois Jezequel ont présenté la plateforme Acumos AI. Un jeune mais ambitieux projet de OrangeLabs qui hébergeait la convention. En tant qu’opérateur télécoms, Orange a besoin d’une plateforme unifiée pour ses développements en intelligence artificielle (IA). Un objectif : limiter la fragmentation et améliorer l’interopérabilité des frameworks de développement IA. Présentée comme une place de marché, elle est composée d’un ensemble d’outils accompagnant chaque projet de la conception au déploiement de l’application. Elle normalise la pile d’infrastructure et les composants requis pour exécuter un environnement d’IA prêt à l’emploi. Cela permet aux data scientists et aux modélisateurs de se concentrer sur leurs compétences de base et d’accélérer l’innovation. À la fois plateforme et framework Open Source, Acumos fait partie du LF Deep Learning Foundation au sein de The Linux Foundation.

 

En fin de journée, la cérémonie de remise de prix des meilleurs projets de l’année a pris place.

Parmi les projets de la base de code OW2, se trouvent FusionDirectory et LemonLDAP::NG que nous utilisons au quotidien chez BOSSTEK. Les représentants de ces 2 logiciels libres, Benoît Mortier et Clément Oudot, ont été récompensé du prix Community Award pour leur projet commun : FusionIAM. Bonita a reçu le prix de l’innovation et Knowage le prix du marché. Bravo messieurs !

 

Le lendemain, Cristina Rosu a abordé dans sa présentation la question du droit à l’oubli dans le cadre du Règlement Général sur la Protection des données (RGPD). Elle a soulevé des questions de fond à propos de l’exploitation des données faite par les sociétés : « Compte tenu de la nature des systèmes d’apprentissage automatique, est-il possible de faire proverbialement oublier un système d’IA ? ». Question épineuse, car une fois les données compilées sous forme de modèle, quel est l’impact d’une suppression ? Comment s’assurer qu’une donnée soit parfaitement effacée sans possibilité de la reconstituer ou de la détourner ? Une approche par l’anonymisation ou l’encryptage ne semble pas pertinente. Une solution pourrait être la minimisation des données ou une normalisation légale sur les modèles de développement d’IA. Une autre approche est entre les mains des utilisateurs : gardez la main sur vos données et utilisez des produits éthiques !

Benoît Mortier et Clément Oudot ont ensuite présenté FusionIAM qui vise à proposer une solution complète de gestion des identités et des accès (Identity and Access Management) avec des logiciels libres : OpenLDAP Fusion, LemonLDAP::NG, LDAP Tool Box et LDAP Synchronization Connector. L’objectif est de proposer une pile complète, intégrée graphiquement, pré-configurée et facile à déployer par l’intermédiaire de packages ou de conteneurs. La gestion du cycle de vie des identités dans une société s’en trouve facilitée. Le système d’information est plus sécurisé et la gestion des habilitations centralisée. À l’heure du RGPD, cela représente un atout en termes d’ergonomie et de coûts de gestion.

Cédric Thomas a présenté la dernière conférence en posant la question : « Est-ce que votre projet est prêt à être mis sur le marché ? » Comment réduire la distance entre les développeurs, qui conçoivent des projets Open Source, et le client final qui doit être convaincu de la qualité du produit ? D’un côté se trouve du code et de l’autre un produit fini, clé en main, est attendu. L’idée est de trouver les outils qui permettront de définir si un produit à une valeur potentielle sur le marché. Ceci, afin qu’un client décisionnaire, un architecte en recherche de solution, puisse disposer des éléments qui le mettront en confiance pour recommander un projet à son manager. L’exemple des constructeurs automobiles éclairci la question. Ces entreprises conçoivent et assemblent des voitures mais ne fabriquent pratiquement plus de pièces détachées. Les voitures sont conçues pour correspondre au marché, aux attentes des clients. OW2 a l’ambition de ne pas se satisfaire d’une myriade d’indicateurs en proposant une simple échelle. À l’image de l’échelle de maturité de la NASA. Beaucoup de questions sont encore en suspend sur les choix de métriques et de perspectives, entre autres, pour obtenir un indicateur fiable et juste. Un appel à contribution a été lancé.

 

Tous les efforts sont bienvenus dans l’Open Source. Un grand nombre de personnes exploitent des projets sans y contribuer de façon visible (commits de code, documentation, tests…). Cela ne fait pas d’eux des mauvais membres de la communauté. Le fait d’être porte-parole et de défendre des produits au quotidien constitue déjà une forme de contribution. Aujourd’hui, une des faiblesses de la communauté Open Source est le manque de moyens en communication. Le défaut de notoriété a tendance à les occulter sur le marché face aux projets privés bénéficiant de moyens publicitaires. Pourtant, le succès d’un produit peut être très rapide et indépendant des moyens publicitaires. La terre entière est hyper connectée. C’est donc l’affaire de tous de ne pas hésiter à promouvoir nos projets Open Source préférés. Ceux qui ne peuvent participer techniquement, peuvent participer d’un point de vue marketing. De très grandes sociétés utilisent massivement les projets Open Source sans forcément en faire la promotion. C’est aussi à ces géants de diffuser la valeur et les valeurs des logiciels libres.

L’ensemble des vidéos des 2 journées sont disponibles sur la chaîne YouTube de OW2 et sur SlideShare.

laurent.bach
oct 2018

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